dimanche 25 août 2013

Note sur certains ateliers du congrès de l'AQPC

L'Association Québécoise de Pégagogie Collégiale tenait son congrès en juin dernier à Montréal.

Voici les notes que j'ai colligé lors des conférences et ateliers auxquels j'ai assisté.

1.       Développer les compétences cognitive pour la socitété du savoir
Pierre Lévy, Université d’Ottawa

Le présentateur met de l’avant l’idée qu’il est important pour nos étudiants de familiariser avec l’évaluation critique de leurs sources d’information.  Il souligne donc l’importance de tenter de connaître l’orientation, le cadrage, le récit et les normes sur lesquelles s’appuient une opinion proposée par un individu ou un groupe.  Il découpe cette évaluation en plusieurs questions, notamment :
– Qui? Identifier la source (personnes, institutions, courants)
– D’où vient le financement? Combien, sources
– Pourquoi? Quels sont les questions, problèmes, agendas (politique, économique, théorique, religieux, etc.) de la source
– Références?  Les sources de la source sont-elles clairement identifiées?
– Quand et depuis quand? Retracer l’origine d’une idée ou d’une information dans le temps.  Reconstituer les « lignes temporelles » des faits et idées

Il est donc important de comprendre que l’objectivité n’existe pas, par contre la transparence devient synonyme d’objectivité en ce sens que plus les auteurs sont transparents, plus ils sont fiables.

Le présentateur propose donc des étapes permettant à l’étudiant de gérer ses sources :
1.        Maitriser son attention
2.       Se connecter à des sources fiables et non-redondantes
3.       Filtrer l’information
4.       Catégories l’information
5.       Enregistrer l’information dans la mémoire à long terme
6.       Faire des synthèses de l’information disponible
7.       Partager et communiquer l’information
8.       Ré-évaluer régulièrement ses sources


2.       Towards inclusive and successful learning for all : universal design in the college classroom
Thomas Henderson, Directeur du centre de recherche pour l’inclusion scolaire et professionnelles des étudiants en situation de handicap

Le présentateur présente des données démographiques en lien avec le nombre d’étudiants ayant recours aux services offerts aux étudiants en situation de handicap ou encore ayant une difficulté d’apprentissage.  Dans le réseau collégial, le nombre d’étudiants est en hausse de façon importante depuis quelques années.  Dans ce contexte, il semble judicieux d’avoir une approche inclusive quant à nos pratiques pédagogiques, ce qui s’inscrit dans une approche nommée « universal design ».

Les principes de base du « universal design » sont les suivants :
-          Ne pas adopter une pédagogie « one size fits all » MAIS plutôt proposer une alternative convenable à chacun
-          Ne pas ajouter ces alternatives de façon réactive MAIS plutôt les inclure à notre pédagogie dès le départ
-          Ne pas privilégier l’accès pour un groupe restreint MAIS plutôt l’accès pour tous

Il s’agit donc de « considérer les besoins de l’ensemble le plus large d’utilisateurs dès le départ » (Ron Mace, traduction libre)


Des applications simples des principes du « universal design » dans une salle de classe comprennent :
-          Offrir l’accès à l’information sous plusieurs formes (vidéo, support audio, document d’accompagnement, documents en format .txt)
-          Énoncer clairement les buts d’une activité et donner un résumé
-          Offrir un support visuel (grilles, graphiques, images)
-          Présenter l’information de façon à pouvoir faire des liens :
o   Surligner l’information pertinente
o   Ajuster la couleur et la taille de la police d’écriture
o   Présenter l’information en « chunks »
o   Illustrer à l’aide d’exemple
-          Faire du modelage de stratégies d’auto-régulation
-          Présenter l’information de façon progressive et en faisant de l’étayage


3.       Classe inversée
Présentateur: Christina Drouin, enseignant de chimie au CÉGEP Maisonneuve

Qu’est-ce qu’un classe inversée?  Il s’agit d’une classe où l’essentiel du temps est passé à appliquer les notions, plutôt qu’à les enseigner.  L’enseignement se fait à l’aide de capsules vidéos (et parfois de lectures) que les étudiants consultent en préparation au cours.  Le but est de permettre aux enseignants de maximiser leurs contacts avec les étudiants en offrant un soutien lors de la réalisation de tâches et exercices en classe.  Puisque l’enseignement magistral est remplacé en partie par le visionnement de vidéos préparées par l’enseignant, une partie importante du temps de classe est libéré à cette fin.  Cela permet également aux étudiants éprouvant certaines difficultés avec un concept de re-visionner la matière autant de fois qu’il est nécessaire!

Le présentateur nous présente les étapes qu’il a utilisées dans sa classe inversée.
1)      Prise de notes : L’étudiant consulte les capsules vidéos (et bien sûr le manuel!) en vue de comprendre la matière qui sera appliquée en classe.  Cette préparation remplace l’enseignement des notions de façon magistrale généralement offert par le professeur
2)      Résumé : Le professeur fait un survol des informations présentées dans la vidéo, en disant juste assez pour que les étudiants n’ayant pas fait la préparation puisse minimalement suivre, mais sans être redondant au point où la préparation n’est plus nécessaire.
3)      En classe : Le temps de classe est destiné à la « pratique » ou à l’application des concepts

Afin de réaliser des vidéos plusieurs outils sont disponibles, une explication sommaire des outils ainsi que de leurs forces et limites est présentée ici :


Est-il nécessaire de couvrir toutes les notions à l’aide de vidéos?  Non!  Puisque la mise en ligne de vidéos demande du temps, il faut penser à 3 ou 4 notions qui paraissent particulièrement difficiles pour les étudiants et qui nécessitent donc la présence de l’enseignant lorsque vient le temps de les appliquer.  Au fil des ans, une banque intéressante de ressources sera ainsi constituée.



4)      What will students do?
Sharon Coyle, enseignante d’anglais langue d’enseignement et conseillère pédagogique au Cégep de Sept-Iles

La présentatrice attire notre attention sur le concept de « backwards planning », c’est-à-dire sur l’importance de planifier d’abord l’évaluation et les objectifs pour ensuite remonter vers les contenus.

Traditionnellement, l’enseignant planifie ses enseignements en passant par les étapes suivantes :
1.       Contenu
2.       Leçons
3.       Évaluation
4.       Objectifs

Dans une approche d’enseignement par compétence basée sur des tâches authentiques (i.e. ressemblant le plus possible à des tâches réelles), il faut plutôt renverser l’ordre
1.       Objectifs
2.       Évaluation
3.       Leçons
4.       Contenu

Cette approche nous permet de nous assurer de l’atteinte de compétences et de les aborder de façon approfondie.  Il devient parfois nécessaire de réduire les contenus (par exemple, lire moins de textes dans un cours d’anglais), mais d’y aller avec une plus grande profondeur (par exemple, prendre le temps de les situer dans leur contexte historique, politique, etc.).

Une autre réflexion permettant de nous guider est de penser aux connaissances et compétences essentielles que l’on souhaite développer chez nos étudiants, mais avec lesquelles ceux-ci ont le plus de difficulté. 


5)      Révision assistée par ordinateur : données de recherche et observations
Martine Ouellet, enseignante au CÉGEP de Drummondville

La présentatrice nous fait état des données obtenues dans le cadre d’un projet de recherche portant sur l’impact de l’utilisation d’un correcticiel (i.e. Antidote) sur la réussite de deux cours de première session (français mise à niveau et un cours spécifique au programme) d’étudiants du programme d’accueil et intégration.

Au sujet de l’utilisation d’Antidote, la chercheure insiste sur les points suivants :
-          Former les utilisateurs aux différentes fonctions et outils sur logiciel
-          Ajuster les paramètres du correcteur afin de le rendre sensible aux particularités de l’apprenant ainsi qu’aux objectifs du cours
-          Procéder étape par étape dans l’utilisation du logiciel : cela implique de modifier les réglages afin que seules les erreurs graves apparaissent au début, pour graduellement rendre les filtres plus sensibles et éliminer les erreurs restantes

Les résultats de cette recherche quasi-expérimentale démontre qu’environ 30% des étudiants ayant l’opportunité d’utiliser l’outil l’ont effectivement fait.  Les utilisateurs réguliers du logiciel ont obtenu une moyenne plus élevés dans les deux cours où la chercheuse a collecté des données (i.e. français et un cours de « méthodologie »).

L’utilisation du logiciel semble avoir un effet plus marqué pour les erreurs en lien avec la ponctuation, la grammaire du texte et la syntaxe.


6)      Et si l’on pouvait évaluer mieux demain?
France Côté, conseillère pédagogique au CÉGEP Marie-Victorin

Citation inspirante: « Mesurer ou évaluer n’équivaut pas à enregistrer de manière externe et objective des acquis, comme le thermomètre indique la température, sans intervention de l’homme, … Au contraire, évaluer des acquis revient à construire un point de vue sur des performances censées représenter des acquis » (Romainville, 2012).

Élaborer une grille d’évaluation à échelle descriptive en 10 étapes :

1. Élaborer une tâche et un contexte
Élaborer une mise en situation et des consignes claires, pour une tâche complexe et authentique

2. Apprécier le produit, le processus ou le propos
                Déterminer si l’on évaluera le produit, le processus ou le propos (il ne faut pas nécessairement faire tous les trois à chaque production, mais il faut évaluer les trois durant la session!)

Produit = production ou performance
Processus = progression ou comment l’étudiant s’y est pris
Propos = discours ou justifications formulés par l’étudiant


3. Identifier les indicateurs prédominants
Critères d’évaluation et description de chacun des échellons

4. Formuler adéquatement les critères d’évaluation
                Ils doivent être observables, pertinents, univoques et en lien avec le produit, le processus ou le propos

5. Effectuer une vérification taxonomique
                S’assurer que si la tâche impliquer un niveau « analyse » les critères évaluent l’analyse!

6. Choisir le type de grille approprié
                Analytique, globale ou hybride?

7. Combien de niveaux de performance ?
                4 à 6

8. Procéder à une description détaillée des résultats attendus à chacun des niveaux
Importance de décrier en détail le seuil minimum (60%).  Au début, il peut être difficile de décrire les niveaux intermédiaires, on pourra se servir des productions d’étudiants pour réviser la grille pour les sessions subséquentes.

9. Éviter les pièges
Éviter d’utiliser des formulations négatives.  Éviter de déguiser des critères quantitatifs en qualitatif.  Éviter les gradations maladroites.

10. Valider l’outil
Demander à nos collègues et étudiants de valider la grille.

Cette présentation était si enrichissante qu’il vaut la peine de partager un lien vers le Powerpoint, sur le site de l’AQPC :